Now, it’s time for culture
En préface à la conférence qu’ Edgard Morin a donnée à Bruxelles le 28 août 2015 – « Now, it’s time for culture » – dans le cadre du Brussels Creative Forum, il nous livre une réflexion profondément humaine et naturelle sur nos réactions possibles face à une société capitaliste en décadence.
Par Pierre de Bie, Nouvelle Acropole Belgique
Faut-il encore présenter Edgard Morin, philosophe et penseur de plus de 93 ans, toujours actif sur tous les fronts où l’Humain tient tête au matérialisme délétère de nos sociétés ?
Après une description sans concession de l’incurie de nos responsables politiques inféodés au capital, Edgard Morin attire notre attention sur les oasis de réaction et de résistance qui refusent le mode de vie consumériste au profit d’une voie axée sur le bien vivre, la solidarité et la joie.
Ces oasis existent et ils sont nombreux : ceux qui consomment bio, sur circuits courts, qui privilégient le bus, le vélo ou le métro, cultivent leurs légumes dans le respect de la nature, produisent leur propre énergie. Loin de se désintéresser du sort du monde, les oasis sauvegardent tous les germes de salut dans un monde qui se croit en développement alors qu’il est en perdition. Ils font office, en quelque sorte, de modules de survie, espoirs pour les générations futures, pour une autre civilisation qui veut naître.
Cette nouvelle civilisation pourrait être la résultante d’un rassemblement de tous ces oasis encore dispersés et qui s’ignorent les uns les autres. Résumant à l’extrême les points principaux de son livre « La voie pour l’avenir de l’humanité », Edgard Morin nous livre sa réflexion sur les propriétés et les valeurs qui devraient animer cette civilisation de demain.
Sur le plan vital de l’alimentation, un abandon systématique de toute production industrielle porteuse de pollution, de souffrance animale et humaine au profit d’un retour à une agriculture et un mode d’élevage traditionnels, fermiers, respectueux du producteur et du consommateur.
Sur le plan social et humain, une restauration de la solidarité, un retour à des rythmes de travail en harmonie avec nos rythmes naturels, en laissant la place à la poésie, les arts et tout ce qui nourrit une culture qui plonge ses racines dans le terreau du bien vivre plutôt que dans celui de l’égoïsme et de la violence.
Au niveau de la consommation, un regain d’intérêt des consommateurs vers des produits artisanaux, fabriqués avec amour, compétence et qualité, engendrerait un abandon des objets à obsolescence programmée et produits dans un unique souci de profit.
Enfin, sur le plan éducatif, une réforme radicale, à tous niveaux, devrait permettre d’enseigner à vivre de manière autonome, solidaire, responsable, amicale.
Nous terminerons cet article en citant le philosophe :
« Les forces obscures et obscurantistes énormes de la barbarie froide et glacée du profit illimité qui dominent la civilisation actuelle progressent encore plus vite que les forces de salut, et nous ne savons pas encore si celles-ci pourront accélérer et amplifier leur développement. Aujourd’hui, il faut comprendre l’alternative : nouvelle civilisation ou barbarie ».